EN ETRANGE PAYS

Lapouge a la tête pleine d’histoires de neige, de vent et d’Amazonie, de gens qui se perdent, se trompent, partent d’on ne sait où et s’en vont dans les décors. Il en fait des fables qui vous ravissent du premier coup, vous amusent, vous en font voir de toutes les couleurs. Le monde l’émerveille et le fait rire. De temps en temps il râle un peu. Quand les cigognes ne passent pas où il faut, quand les abeilles font de la dépression nerveuse, quand les hirondelles nous donnent des leçons, quand des arbres lilliputiens défient la méga-forêt brésilienne comme les perroquets défient le temps. Lapouge tire ses exemples d’animaux très grands ou très petits, et parmi eux, le plus curieux des mammifères. Celui dont le métier est de raconter des histoires et des rêves, l’homme bien tranquille que ses voisins prenaient pour le gardien de l’immeuble, celui qui se mêle à la foule des navigateurs solitaires. Il y en a même qui portent un nom, comme Borges, qui ment tout le temps, ou Kadaré, incapable de planter le moindre arbuste. Il faudrait ajouter des douaniers qui s’ennuient, des pays où l’on n’arrive jamais, des labyrinthes, des galaxies, des livres aussi, qui sont le plus beau des continents. Comme « Le bruit de la neige », comme « Besoin de mirages », ces chroniques n’attendaient qu’un signe pour devenir un petit livre enchanteur.